Dégustons l’huitre de Marennes Oléron

huitre marennes.jpgDe passage sur l’île d’Oléron lors de mes congés d’été, je n’ai pas résisté au plaisir de déguster la production locale d’huitres et de découvrir plus en profondeur l’activité ostréicole.
Cette industrie a fait la une des journaux en juillet dernier, du fait d’une surmortalité record des naissains (jeunes huitres de un à deux ans). Si les réveillons de fin d’année ne sont pas menacés, cette disparition soudaine et massive ne sera pas sans conséquence pour les années à venir (dés 2010-2011); rappelons qu’il faut trois à quatre années pour qu’une huitre (après une période variable d’affinage dans les claires) ne soit consommable.

Une surmortalité qui a décimé en l’espace de quelques mois l’ensemble des bassins ostréicoles français, avec des taux de mortalité allant de de 40 à 100 % des naissains d’huîtres creuses, tous ou presque d’origine japonaises, soit 99% de la production française.

Une véritable catastrophe pour les milliers de personnes vivant de cette industrie, vitale pour l’économie de leurs territoires ; avec 130.000 tonnes par an la France est le premier producteur européen et le quatrième mondial derrière la Chine, le Japon et la Corée du Sud. Une activité qui est également un argument touristique de premier plan pour ces régions !

Le plus paradoxal est que l’huitre est à la fois robuste, elle est de loin antérieure à l’arrivée de l’homme sur terre, et fragile.  Sa survie est totalement liée à l’équilibre et la vitalité d’un éco système complexe, qu’il ne faut surtout pas limiter à l’Océan, notamment dans le cas de l’huitre de Marennes, car bien des paramètres interviennent y compris terrestres : température de la mer, apports en eau douce, salinité, prédateurs, algues, pollution des effluents et affluents …

La crise traversée aujourd’hui par le monde ostréicole est une illustration parfaite des problématiques actuelles. Ou comment concilier développement vertueux de nos territoires, interrelations entre nos différentes activités et le milieu, gérer le risque sanitaire et protéger notre environnement …

Car tout est lié !

 

 

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Si autrefois pour déguster des huitres, il fallait les « cueillir » sur les bancs naturels en mer, la production d’huitre est désormais une véritable industrie de pointe, qui présente beaucoup de similitudes avec celle du vin : vocabulaire (en bouche, affinage …), importance du site et des paramètres naturels, suivi sanitaire, poids économique pour les régions productrices …

Chaque huitre dégustée possède des spécificités gustatives propres en fonction de son lieu d’élevage, les ostréiculteurs français n’élèvent principalement qu’un type d’huitre, dite « japonaise »,  ce qui n’a toujours pas été le cas, ce choix dépendant de la capacité de l’huitre à résister aux attaques de parasite ou de virus …
L’huitre native de nos côtes, toujours produite, est le « belon » (Ostrea edulis) qui a laissé progressivement à l’huître portugaise (ou Crassostrea angulata) rejetée dans l’estuaire de la Gironde en 1868 et qui s’était acclimaté à merveille aux charmes de nos côtes jusqu’au mois d’aout 1970, où elle a quasiment été éradiquée après une épizootie qui a détruit l’ensemble des élevages de la côte atlantique française. Depuis les ostréiculteurs ont importé en masse l’huître creuse « japonaise » (Crassostrea gigas) résistant à cette maladie, qui subit aujourd’hui une surmortalité qui fait redouter le pire aux producteurs.

Car l’huitre est un produit naturel dont la survie est intimement liée à la qualité de son éco système et aux phénomènes naturels : vents forts, tempêtes (telle celle 1999), changements de courant, bancs de sables, vases … La moindre variation de paramètres aussi divers que la température, la turbidité, la salinité, la diversité phytoplanctonique influe directement  sur la qualité de la production.
L’huitre subit également la concurrence de « compétiteurs » comme les moules, ou de prédateurs tels le bigorneau ou l’étoile de mer … Autant dire que le métier d’ostréiculteur n’est pas de tout repos et que cette activité demande un suivi et des interventions quasi quotidiennes qui ne se limitent pas à la seule collecte, notamment à Marennes-Oléron.
Ce parc ostéicole possède des spécificités bien étables : milieu protégé des courants et des fortes marées, importance de l’apport en eau d

ouce, période d’élevage dans les claires (marais) occasionnant beaucoup de manipulation aux producteurs des pousse de claires et fines de claires, ce qui leur fait dire, d’ailleurs que leur huitre est un fruit de mer et de terre …

Les scientifiques ont cerné la cause principale de la surmortalité qui a touché les parcs français. Il s’agirait d’un virus : l’Ostreid Herpes virus 1, ou OsHV-1, connue pourtant par les spécialistes depuis de longues années mais qui aurait trouvé en 2008 un ensemble de conditions favorables pour se développer : . conditions climatiques particulières de l’hiver, printemps pluvieux, remontée rapide des températures, présence d’alg

ues …

Les chercheurs de l’IFREMER ont du pain sur la planche pour garantir la qualité et la pérennité de la production française, d’autant que le réchauffement

climatique risque de perturber la donne actuelle … En influant la qualité de notre production mais en permettant également à de nouveaux pays situés plus au nord de devenir concurrentiels (les Pays Bas)… La tentation de recourir à des OGM risque également d’apparaitre, ici ou là bas (USA ?)

Car tout en réfutant une telle piste, la recherche a débouché sur une nouveauté : l’huître triploïde, dite également huitre des quatre saisons, obtenues en écloseries par croisements. Des huitres stériles, ne fabriquant pas de gametes, et ne dépensant leur énergie qu’à grandir ! Elles ne sont pas laiteuses en été, poussent plus vite et se consomment à toute saison, car non concernées par le cycle habituel de la vue. Une huitre discutée par nombre d’ostréiculteurs ne désirant pas élever de produits non naturels, dont les naissains sont élevés exclusivement en écloserie (c’est tout de même un système de dépendance similaires aux semences OGM de Monsanto par exemple) et en milieu confiné afin d’éviter tout risque de contamination …

Voilà qui nous éloigne du plaisir simple offert par la dégustation de ce cadeau de la mer qu’est l’huitre naturelle  !

 

Qiu Xiaolong ou le Petit dragon

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Le moment est particulièrement bien choisi pour vous faire découvrir un de mes romanciers favoris, l’écrivain chinois Qiu Xiaolong (petit dragon en chinois) : les vacances d’été sont propices à la découverte de  livres policiers dépaysant, et les siens le sont à plus d’un titre, l’intérêt grandissant pour la Chine, ce pays continent qui accueille les jeux olympiques, la série de ses nouvelles inédites que Le Monde publie …

Maisplus encore,  l’originalité de cet auteur que j’ai découvert il y a plus de 5 ans et la très grande qualité de ses romans qui ont le bon gout d’être publié en poche.

Quelques mots sur son itinéraire : il est né à Shanghai en 1953, où il grandit, sa famille est victime des gardes rouges durant la Révolution culturelle, lors de ses études il intègre l’Institut des Sciences Sociales de Shanghai. Remportant une bourse d’études, il part aux Etats-Unis en 1988, afin de rédiger son doctorat sur l’auteur T.S. Eliot. Les évènements de Tienanmen éclatent, il écrit des articles, en faveur des étudiants et devant la répression décide de rester aux Etats Unis.
Il enseigne alors à l’université de Saint Louis et se met à écrire en anglais. Devant le succès rencontré, il se consacre uniquement à cette activité.
Publié dans une vingtaine de pays, il retourne depuis 1997 en Chine pour de courts séjours, ce qui lui permet d’être très informé sur l’état de son pays d’origine et de ses habitants.

Une acuité que l’on retrouve dans tous ses romans.Ses livres sont bâtis autour d’un personnage principal récurrent, l’inspecteur Chen Cao, tout à la fois cadre du Parti,  membre de l’Union des écrivains et policier.

L’intrigue policière est le prétexte pour nous plonger dans le véritable Tsunami subit par la Chine depuis l’ouverture économique initiée par Den Xiaoping. Un bouleversement sans précédent.

Comme l’écrit Xiu  » La transition, c’est que le pire des deux s’est uni : le pouvoir du parti unique avec le capitalisme le plus sauvage. »

C’est dire …

 


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Période charnière que ses romans décrivent à merveille. C’est en 1996 que l’idée lui est venue de laisser de coté la poésie pour se lancer dans le polar. Un parti pris qui lui permet grâce à ses intrigues et à ses personnages de décrire la réalité de son pays.
Cette volonté explique la profondeur et la complexité de ses personnages, notamment l’inspecteur Chen qui permet d’avoir une analyse assez complète des  traumatismes subis par la Chine et les Chinois :  culture, politique, vie quotidienne…

Autre raison de ce choix, « combattre la  vision caricaturale qu’ont les américains des chinois et de la Chine ; je voulais à travers mon personnage faire voir que nous étions beaucoup plus complexe que ce qu’ils pensaient (des chinois pauvres, illettrés, aux idées simplistes…) et leur amener une réflexion nouvelle face aux Chinois ».

La galaxie de personnage qui peuplent ses romans permettent également de multiplier les points de vue et les analyses croisée et de décrire ainsi toutes les affres qui secouent un pays ou l’argent est devenu le seul standard de la réussite.
Une période difficile pour les lettrés et les poètes, ce qui explique l’atmosphère particulière des romans de cet auteur attachant que l’on sent également un peu perdu. Fort heureusement, Chen est un épicurien, qui aime la cuisine, est sensible à la beauté féminine et qui s’il combat la corruption demeure un fin politique …

Les livres de Qiu Xiaolong ont bien d’autres arguments : leur rythme, la place prise par les allusions poétiques et les citations d’érudits chinois, les analyses sans concession de la tradition confucéenne et du Maoisme, l’humanité des personnages, quelque soit leur coté : criminel ou justicier …

Mais le mieux c’est de lire ses intrigues au fil du cheminement du personnage principal et de son évolution dans la société et dans ses rencontres … Donc de commencer par « Mort d’une héroïnerouge » puis « Visa piur Shangaï » puis …

http://www.qiuxiaolong.com/

Bibliographie :

La Danseuse de Mao, Liana Levi (2008)

De soie et de sang (Éditions Liana Levi, 2007)

Le très corruptible mandarin (Éditions Liana Levi, 2006)

Encres de Chine (Éditions Liana Levi, 2004)

Visa pour Shangaï (Éditions Liana Levi, 2003)

Mort d’une héroïne rouge (Éditions Liana Levi, 2001)

Engen Pammonhalma, 10 ans …

1083613622.jpgJ’étais ce week end en Allemagne, invité par la ville de Engen (notre ville jumelée) à fêter le 10 eme anniversaire de son jumelage avec la ville hongroise de Pannonhalma (cf note précédente)..

10 années déjà …   cela représente beaucoup à l’échelle d’une vie d’homme, mais théoriquement peu dans l’histoire d’un pays. Pourtant certains évènements accélèrent singulièrement le fil de l’histoire, illustration géo politique de l’effet papillon cher aux météorologues (voir note ).
L’époque récente fourmille de telles dates, dont celle du 9 novembre 1989, qui a tant changé de vies. La chute du mur de Berlin a marqué pour l’Europe une nouvelle naissance, notre continent a enfin pu retrouver son deuxième poumon, celui de l’Est, dont il avait tant besoin pour être de nouveau lui même !

 

C’est aussi cela ce jumelage  !

 

 

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La chute du mur de Berlin, évènement attendu s’il en est, est la résultante d’une véritable vague de fond qui a secoué l’Europe de l’Est, dont  les tragédies de Budapest de 1956 et de Prague en 1968, où tant d’hommes et de femmes ont péri, sont l’illustration.
J’ai toujours en tête les images noires et blancs du poste de télévision de l’époque et le bruit des chars russes envahissant les rues de Prague. Des souvenirs amplifiés par la suite, par la lecture lors de mes années lycées d’oeuvres telles « Le zéro et l’infini (Darkness at noon) », de d’Arthur Koesler, et de l’intérêt sucité par la destinée d’hommes comme Imre Nagy en 1956 et Dubcek en 1968,

J’ai eu la chance il y a deux ans de découvrir le magnifique pays, qu’est la Hongrie lors d’un voyage qui reste pour moi, mémorable (cf note précédente). Je comprends mieux depuis  pourquoi les magyars sont si fiers de leur culture, qu’elle soit celle des mots ou des notes de musique et l’incidence de celle ci sur la notre. Nous en avons encore eu l’illustration ce week end avec une presation remarquable de trois solistes hongrois : orgue, guitare et piano.
Cette nation n’est pas seulement la patrie de Sandor Petöfi, poète de légende et héros de la Guerrre d’indépendance de 1848, auteur d’un vers prémonitoire : « Liberté, amour, voici ce qu’il me faut, Pour mon amour je sacrifierais ma vie,Pour la liberté, je sacrifierais mon amour ! », mais également celle de Ferenz Lizt et de tant d’autres, dont, plus prés de nous, Imre Kertesz, prix Nobel de  littérature en 2002.

Ce grand écrivain, rescapé de l’holocauste et survivant d’Auschwitz, ayant vécu de longues années sous le régime communiste, a déclaré simplement, le jour où il a reçu son prix à Stokholm, que son histoire personnelle mêlée à celle de son grand pays, l’avait rendu plus lucide.
Une lucidité fertile avait il précisé, dans laquelle «  réside la plus admirable valeur européenne« , il avait également souligné le «frémissement de la liberté, qui donne à notre vie sa richesse » (voir plus loin).

Les histoires de nos trois pays sont sans nul doute différentes, nos langues également, mais nos cultures beaucoup moins, car l’Europe a toujours été terre de rencontre et de mélanges …La lucidité commune (pour reprendre l’expression d’Imre Kertesz) qui nous anime à Pannonhalma, Engen ou Trilport, repose en grande partie sur les moments douloureux traversé par l’Europe le siècle dernier et qui ont touché au plus profond nos pays. Cette expérience constitue un ciment fort, permettant après un long cheminement millénaire, à une citoyenneté européenne, celle de nos enfants, d’émerger …

Elle est d’autant plus solide qu’elle est bâtie sur des valeurs partagés, basées sur le respect de la vie humaine, de la liberté d’expression, de nos cultures respectives et d’un patrimoine naturel dont la Planète a tant besoin … Rainer Maria Rilke, européen d’avant-garde  s’il en est, l’avait si bien écrit :  « La destinée ne vient pas du dehors à l’homme, elle sort de l’homme même. »

Nous sommes européens car c’est notre destinée commune. Nous devons y travailler comme les abeilles font leur miel, inlassables, chacune à sa place, butinant et découvrant ici et là, des saveurs et des odeurs nouvelles qui permettront d’obtenir un miel meilleur car riche en parfum et saveurs plurielles,

Que de chemins parcourus en 10 ans ! Que d’échanges, de visites communes, de moments heureux passés, ensemble …Souvenons nous, 1998 c’était au siècle dernier et l’an 2000 n’était pas encore passée …

Il faut saluer le rôle d’hommes comme Johanes Moser, le maire d’Engen et d’Ulrich Scheller, responsable de ses jumelages, pour avoir su initier ce formidable mouvement d’amitié qui permet de créer d’innombrables passerelles entre France, Allemagne et Hongrie …

Cet anniversaire est un heureux évènement, la réalité des faits démontre chaque jour un peu plus, l’urgence de bâtir l’Europe du concret et des citoyens …

 

 

Extrait du discours d’Imre Kertesz, prix Nobel de  littérature, en Novembre 2002, à Stokolm.

« D’anciennes prophéties disent que Dieu est mort. Il ne fait aucun doute, qu’après Auschwitz, nous sommes restés livrés à nous-mêmes.

Il nous a fallu créer nos valeurs, jour après jour, par un travail éthique opiniâtre mais invisible qui finira par produire les valeurs qui donneront peut-être naissance à la nouvelle culture européenne.

Que l’Académie Suédoise ait jugé bon de distinguer précisément mon œuvre prouve à mes yeux que l’Europe éprouve à nouveau le besoin que les survivants d’Auschwitz et de l’Holocauste lui rappellent l’expérience qu’ils ont été obligés d’acquérir.

 Mais ce qui a été révélé à travers la solution finale et « l’univers concentrationnaire  » ne peut pas prêter à confusion, et la seule possibilité de survivre, de conserver des forces créatrices est de découvrir ce point zéro.

Pourquoi cette lucidité ne serait-elle pas fertile ? Au fond des grandes découvertes, même si elles se fondent sur des tragédies extrêmes, réside toujours la plus admirable valeur européenne, à savoir le frémissement de la liberté qui confère à notre vie une certaine plus-value, une certaine richesse en nous faisant prendre conscience de la réalité de notre existence et de notre responsabilité envers celle-ci. »

 

 

Gros temps pour les Moldus ?

4d12e1ec5f2e29a96c7a404e41544fd0.jpg Retour sur un évènement qui s’est déroulé il y a tout juste quelques jours, samedi 21 juillet, la sortie du 7ème tome des aventures de Harry Potter :  » Harry Potter and the Deathly Hallows »  (Harry Potter et les reliques de la mort), ou la conclusion d’une  saga qui depuis 1997 passionne jeunes et moins jeunes du monde entier.

Une sortie réellement planétaire préparée avec le plus grand soin et une certaine paranoïa par les éditeurs, voulant éviter toute fuite avant l’heure fatidique. Il est vrai que le buzz autour de la disparition de certains personnages centraux de la saga suscitait beaucoup d’attente et d’interrogations des millions de lecteurs désirant connaitre le sort fait à leurs personnages favoris.

L’œuvre monumentale de JK Rowling n’a pas d’équivalent dans la littéraure mondiale. C’est tout d’abord un vrai conte de fée, celui de son auteur, maman anglaise divorcée, sans emploi,  vivant d’allocations chez sa soeur rédigeant un roman basé sur le parcours initiatique d’un apprenti sorcier qu’elle n’arrive pas à publier …  Au bout d’un an de démarches et aprés une douzaine de refus, elle réussit à signer un contrat avec un éditeur Londonien, la maison Bloomsbury, pour  » Harry Potter and the Philosopher’s Stone  » (Harry Potter à l’école des sorciers), publié en juin 1997  à 1.000 exemplaires seulement !
Depuis, la saga de Harry Potter est devenu le plus grand phénomène économique de l’histoire de la littérature :  plus de 325 millions d’exemplaires vendus dans le monde (pour les 6 premiers tomes), des traductions en 65 langues dans 200 pays, quatre adaptation réalisées au Cinéma qui ont déjà rapporté 2,6 milliards d’euros de recettes à la Warner Bros, auquels il faut ajouter les revenus des innombrables produits dérivés générant des dizaines de milliards d’euros de bénéfices. En 2006, Joanne Kathleen Rowling est devenue milliardaire et c’est une des plus importantes fortunes du Royaume Unie … Un vrai conte de fée !

Alors que penser d’un tel succès ?
L’audience planétaire de l’apprenti sorcier est elle une nouvelle manifestation de la domination du domaine culturel « impérialiste » anglo saxon, des lois du marché et d’une pensée unique ?

Pas nécessairement, les racines de cette réussite sont peut être beaucoup plus profondes et c’est bien là tout l’intérêt de ce qui est devenu ‘un vrai phénomène de société  …


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Effet de mode, certainement mais pas seulement, loin s’en faut !

Cela fait déjà 10 ans que ce phénomène d’édition passione la planète, relayée il est vrai par une politique marketing des plus efficaces amplifiée par les sorties successives des films issus de la saga … Mais rappelons cependant qu’en France, le premier opus sorti chez Gallimard en 1998 a dépassé en quelques mois la barre des 100.000 exemplaires vendus, du jamais vu pour un livre jeunesse, succès qui ne s’est jamais démentie depuis !

Un engouement vérifié dans les 200 pays où le livre a été publié, une réussite planétaire qui rappelle indiscutablement celle de StarWar dont le succès est tout sauf le fruit du hasard.
Georges Lucas (le créateur de StarWar) comme son ami Spielberg, autre faiseur de légendes avait étudié de prés les théories de Joseph Campbell, un professeur américain ayant beaucoup travaillé sur l’étude des mythes. Ils l’auraient eu même comme professeur !
Cq;pbell a développé une nouvelle approche de l’étude des religions basée sur la recherche d’une théorie unificatrice : l’ensemble des  différentes religions (orientales,  occidentales) répondraient aux mêmes questions essentielles, en suivant des archétypes similaires. Une théorie dont les fondements reposent sur une étude très poussée des différentes civilisations qu’elles soient orientales , américaines, africaines ou occidentales  (citons notamment les travaux de Mircea Elliade)

Il  a notamment analysé le rôle du héros dans les différentes mythologies , basées sur la théorie du voyage initiatique. Le héros répond  à un  «appel à l’aventure» , quitte son environnement, combat un  «gardien du seuil», premier obstacle de son voyage  (la plupart du temps avec l’aide d’un mentor), accède ensuite grâce à sa victoire à une autre dimension où il subit une série d’épreuves qui lui permettront d’accomplir sa quête émancipatrice (là sans l’aide de son mentor), avant de retourner chez lui complètement transformé …
Pour Campbell tous les héros mythiques suivent un parcours contenant au moins une partie de ce schéma et obéissant à certains ressorts psychologiques fondamentaux reposant sur des conflits souvent intérieurs. Car le conflit joue un rôle central, le héros doit en arriver à bout, et ce faisant il en sort transformé ainsi que sa destinée (même s’il peut y avoir plusieurs héros). Une lutte souvent intérieure entre l’égo et la «personnalité » du héros dont l’issue peut être heureuse ou mené à la tragédie. Nous ne sommes plus loin d’une phrase fétiche de Sartre : l’identité est une trajectoire …

Une logique à laquelle répond totalement l’épopée de Harry Potter, et qui apporte un autre éclairage sur les raisons de son succès planétaire. Il ne s’agit pas ici de « standardisation » et de victoire d’un modèle unique anglo saxon imposé à tous mais plutôt de la réussite d’une histoire obéissant à des archétypes universels  basés sur  un inconscient collectif partagé  et qui explique qu’objets magiques, créatures fantastiques, sortilèges, potions, plantes magiques , bref l’univers cher à Harry Porter « parlent » à tous quelque soit le continent ou la religion …

On trouvera également  et plus simplement trois autres qualités majeures à l’œuvre de J.K Rowling :

Le retour de la force de l’imaginaire. Les jeunes de 2007 tremblent de nouveau devant des histoires de fées, de dragons et de sorciers qui ont fait vibrer des générations d’enfants, s’endormant au rythme des « Il était une fois … »

Le goût à la lecture, puisque ce sont sept volumes et la description d’un univers complet qui composent la saga des Harry Potter

Et de manière plus anecdotique, pour la France, le développement de l’anglais. C’est plus de 200 000 livres qui ont été  édités dans notre pays en  version originale !

 

La morale de l’histoire ? Elle a été écrite par J. K. Rowling

« Ce sont nos choix qui montrent ce que nous sommes vraiment. »

 

Le moldus est une personne ne possédant pas de pouvoirs magiquesm ce qui est malheureusement mon cas

Le pays des hommes integres

002c26a276a915985e3765edff6679fe.jpgNous avons eu le plaisir de recevoir durant quelques jours une délégation de deux élus burkinabés, dont le Maire de Niou, Ousmane Diallo.
Niou est une ville située au Burkina Fasso, l’ancienne Haute Volta, pays francophone d’Afrique de l’Ouest coincé entre désert du Sahara et savane, dont beaucoup d’habitants ont versé leur sang pour notre pays. Ils étaient de ces tirailleurs sénégalais morts pour la France lors des deux conflits mondiaux du siècle dernier.
La Haute-Volta a acquis son indépendance en 1960, avant de prendre le nom de Burkina Faso ou « Patrie des hommes intègres  » en 1984, sous l’initiative de Thomas Sankara. Pour situer rapidement ce pays ami rappelons qu’il ne dispose d’aucun accès maritime, qu’il est entouré de six autres pays (Mali, Niger, Bénin, Togo, Ghana et Côte d’Ivoire), et figure parmi les pays les plus pauvres de la planète, la moitié des habitants vivant en dessous du seuil de pauvreté..

La visite des deux élus (Ousmane Diallo était accompagné d’une Conseillère municipale) est le prolongement des nombreux échanges entre nos deux communes (en fait Niou est un regroupement de 21 villages et compte plus de 26 000 habitants) menés grâce à l’activité d’e l’association « Seine et Marne Sahel, Burkina Fasso » animée par Charles Brossier, Docteur infatigable qui malgré ses 80 printemps déploie une énergie à déplacer les montagnes.

Ils ont répondu à l’invitation du Conseil Municipal et leur visite  me donne l’occasion de revenir sur l’importance et la richesse de tels échanges pour nos deux collectivités, mais plus globalement pour nos deux pays …

 

 

 

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Depuis plus de 12 ans l’association Seine et Marne Sahel Burkina Fasso réunit grâce à l’énergie de ses bénévoles organisant diverses manifestations (ventes, collectes) des moyens financiers ou matériels qui lui permette d’apporter une aide concrète et directe aux burkinabés dans des domaines essentiels d eleur vie quotidienne : santé, éducation, soutien aux femmes, approvisionnement en eau ou en énergie.

Cette association privilégie deux axes d’action prioritaires  :
– apporter une réponse directe aux besoins locaux et réels du terrain,
– travailler sur le moyen et long terme en favorisant l’acquisition de savoir faire dans une perspective de co développement pérenne mené par les habitants eux mêmes.

Sur ces bases, elle a initié diverses actions en partenariat avec la population locale : création d’une bibliothèque avec son forage, d’un puit pour les écoles de Niou, d’un point santé au lycée de Boussé, dotation d’une salle informatique pour cet établissement, a soutenun la mise en place de jardins scolaires, échanges entre élèves burkinabé et français (correspondance scolaire, journal, …). Une de leur dernière initiative est le don de cinq vélos aux conseillères municipales de Niou résidant à plus de 50 km du siège de leur commune, afin de leur permettre de participer aux sessions municipales qui sont surtout le lieu de mise en place des outils d’un développement maitrisé. Il faut souligner que le Burkina est un des rares pays africain depuis la Présidence de Thomas Sankara qui soutient la condition féminine (la parité est la règle aux élections).

Deux des causes indiscutables des difficultés traversées par ce pays, est le facteur climatique et la gestion de l’eau. La saison des pluies ne dure environ que 4 mois, entre mai et septembre, une durée encore plus réduite au nord du pays soumis également à la progression du désert.
Si l’agriculture occupe 80% de la population active, elle pâtit du manque d’eau, de l’aridité des sols et de la mono culture dirigée vers l’exportation, tel le coton (trés consommateur d’eau) dont le Burkina est le premier producteur du Sahara. Son économie souffre énormément de la chute des cours mondiaux orchestrée par les USA qui font bénéficier leurs fermiers d’aides de l’Etat et mettent à mal la concurrence des pays du tiers monde (lire l’excellent livre d’Orsenna sur le coton justement) …

Conséquence de ces difficultés mais également du manque de structure dues à la période coloniale, le Burkina est un des pays les plus pauvres du monde, un constat souligné par l’Indice de développement humain (IDH). Cet indicateur est un indice statistique créé par l’ONU en 1990 qui permet de classer les pays du monde au regard de leur développement qualitatif (contrairement au PIB qui se limite au quantitatif).
Il est calculé à partir de trois critères : la santé /longévité (mesurées par l’espérance de vie à la naissance), le savoir ou niveau d’éducation (mesuré par le taux d’alphabétisation des adultes) et le niveau de vie et va de 0 (indice le plus bas) à un. En 2003, sur 177 nations, les pays à développement humain élevé (IDH ? 0,8) représentaient 57 pays (1er Norvège avec un IDH de 0.963, 2eme l’Islande : 0.956, 3eme l’Australie : 0.955), la France se classant 16eme avec 0.938. Les pays à développement humain moyen (0,8 > IDH ? 0,5) représentaient 88 pays) et les Pays à faible développement humain (0,5 > IDH) 31 pays dont le Burkina Fasso 175 eme avec 0,317 sur 177 pays classés !

Ce résultat démontre le décalage entre discours et principe de réalité. Nous sommes en effet trés éloigné de 2000 ou les Nations Unies avaient validé les « objectifs du millénaire » qui prévoyaient pour 2015 et la planète la réduire de moitié de l’extrême pauvreté (1 dollar / tête / jour), de la mortalité infantile, d’intensifier la lutte contre les pandémies (sida, paludisme …) et d’augmenter sensiblement l’aide financière et humanitaire des pays développés vers l’Afrique … Paradoxalement ce dernier objectif, loin d’être atteint notamment au niveau de la France, baisse d’année en année. Une situation qui ne semble pas remise en cause par le nouveau président Français.

ET je ne parle pas de la « perte en ligne », entre aide accordée ici et moyens arrivant concrètement sur le terrain. Le manque d’infrastructure, la corruption sont des freins redoutables qui rendent d’autant plus indispensable l’action d’association comme celle animée par Charles Brossier, se révèlant sur le terrain beaucoup plus efficace car se passant d’intermédiaire et étant basée sur un co développement géré au plus prés des besoins de la vie locale …
D’autres pays ont saisi l’intérêt de profiter de cette « timidité » des pays occidentaux afin de se positionner sur ces futurs marchés potentiels. Une tendance qui bouleverse les équilibres géo politiques issus de l’histoire partagée entre pays colonisateurs et anciennes colonies.
Un pays continent comme la Chine par exemple implante de plus en plus de pions sur ce jeu de go planétaire dont l’Afrique Noire constitue un élément important de par son formidable potentiel. Cette nation devenant du coup incontournable pour déminer certaines crises humanitaires comme celle du Darfour notamment.

 

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C’est aussi de tout cela que nous avons discuté avec Ousmane Diallo lors de son séjour. Les visites effectuées sur le terrain lui ont permis de comparer les organisations de nos communes et l’importance pour l’action publique d’infrastructures et de logistique.
Il a visité nos écoles, enjeu capital pour le développement de son pays, y a rencontré enseignants et élèves, notamment les classes qui correspondent avec les enfants de Niou, et a pu répondre aux questions très variées des écoliers sur les modes de vie et la scolarité telle qu’elle est vécue par les jeunes africains : école payante et non obligatoire, classe surchargée … La surprise a été grande quand au détour d’une réponse il a précisé que certains enfants faisaient plus de trente kilomètres à pied pour apprendre à lire et à écrire !

Le chantier du nouveau réfectoire de l’école de la Charmoye, en construction, équipement bâtie selon la démarche de Haute Qualité Environnementale a été à l’origine d’échanges trés fructueux sur la nécessité d’économiser l’eau, ressource vitale, rare et précieuse, de maitriser les techniques d’irrigation, d’utiliser au mieux le soleil et la lumière mais également les énergies renouvelables les plus adaptées surtout lorsque l’on aborde la question du réchauffement planétaire et nous avons beaucoup à apprendre des africains.
Nos pays développent acutellement de « nouveaux concepts architecturaux et thermiques » destinés à limiter la prolifération des gaz à effets de serre qui leur permettent de redécouvrir ce qui se fait depuis des siècles dans les pays africains ou ailleurs, basé sous le signe de l’économie et de la prise en compte de la nature … Une réelle école d’humilité …

95ad40c1ed1c73ab2989a93db9a4384b.jpgD’autres échanges se sont déroulés jusqu’à la réception officielle qui a permis de projeter des photos de ce magnifique pays. Ousmane Diallo nous a présenté lors de cette soirée, certaines actions d’un Micro Plan de Développement local qu’il veut lancer pour sa commune et qui pourra servir de base à de prochaines initiatives.
Citons, entre autres, la recherche de financement pour l’acquisition de vélos permettant à des femmes conseillères de se rendre au Conseil Municipal (50 km), la gestion de l’eau avec la construction et l’aménagement de barrage, de point d’eau, de forages dans les villages, la mise en place de comité d’hygiène et d’assainissement, le développement d’énergie renouvelables comme celle des éoliennes, l’installation de moulin, le développement de l’autosuffisance agricole (construction de banque de céréales, production d’engrais naturels …) mais également et surtout une aide sur les questions sanitaires (hôpitaux, éducation de la population afin de lutter contre les épidémies et la dotation d’équipements pour le scolaire permettant d’amplifier les campagnes d’alphabétisation menées …

Une rencontre enrichissante pour tous, africains comme européens, permettant de découvrir une face méconnue de notre planète, les besoins vitaux d’un pays ami comme le Burkina, de méditer également sur les « vraies » priorités de la vie et qui a constitué pour nos jeunes et moins jeunes une formidable fenêtre vers l’action, la solidarité, l’amité, la découverte de la planète.
Elle a permis également peut être de mieux discerner l’accessoire de l’essentiel et de mieux apprécier la chance d’avoir de l’eau, de l’électricité, une bonne santé et des écoles …

De quoi voir la Marne avec des yeux de Chimène …

 

 

Discours de Thomas Sankara à l’Onu, le 4 octobre 1984

 » Je parle au nom des mères de nos pays démunis qui voient mourir leurs enfants de paludisme ou de diarrhée, ignorant qu’il existe, pour les sauver, des moyens simples que la science des multinationales ne leur offre pas, préférant investir dans les laboratoires de cosmétiques et dans la chirurgie esthétique pour les caprices de quelques femmes ou d’hommes dont la coquetterie est menacée par les excès de calories de leurs repas trop riches et d’une régularité à vous donner, non, plutôt à nous donner, à nous autres du Sahel, le vertige …

Mon pays est un concentré de tous les malheurs des peuples, une synthèse douloureuse de toutes les souffrances de l’humanité, mais aussi et surtout des espérances de nos luttes. C’est pourquoi je vibre naturellement au nom des malades qui scrutent avec anxiété les horizons d’une science accaparée par les marchands de canons. Mes pensées vont à tous ceux qui sont touchés par la destruction de la nature et à ces trente millions d’hommes qui vont mourir comme chaque année, abattus par la redoutable arme de la faim… Je m’élève ici au nom de tous ceux qui cherchent vainement dans quel forum de ce monde ils pourront faire entendre leur voix et la faire prendre en considération, réellement. Sur cette tribune beaucoup m’ont précédé, d’autres viendront après moi. Mais seuls quelques-uns feront la décision. Pourtant nous sommes officiellement présentés comme égaux. Eh bien, je me fais le porte-voix de tous ceux qui cherchent vainement dans quel forum de ce monde ils peuvent se faire entendre. Oui, je veux donc parler au nom de tous les «  laissés pour compte » parce que « je suis homme et rien de ce qui est humain ne m’est étranger « 

 Thomas Isidore Noël Sankara (21 décembre 1949 à Yako – 15 octobre 1987 à Ouagadougou), militaire et homme politique panafricaniste et tiers-mondiste, il incarna et dirigea la révolution burkinabè du 4 août 1983 et entreprit en qualité de Président du Burkina Fasso des réformes majeures afin de lutter contre la corruption et améliorer l’éducation, l’agriculture et le statut des femmesAssassiné lors du coup d’État de son successeur Blaise Compaoré. Son héritage politique et « identitaire » est considérable, et sa renommée a rejoint celle d’hommes comme Patrice Lumumba.

 

 

Le Burkina Faso en chiffres

Indice de développement humain (IDH) : 174e sur 177 en 2006

Superficie : 274 200 km²

Densité : 44 hab./km²

Frontières terrestres : 3 192 km
(Mali 1 000 km ; Niger 628 km ; Côte d’Ivoire 584 km ; Ghana 548 km ; Bénin 306 km ; Togo 126 km)

Extrémités d’altitude : + 200 m > + 749 m

Indépendance : 5 août 1960 (ancienne colonie française)

Population : 13 200 000 habitants (en 2005). 0-14 ans : 47,5%; 15-64 ans : 49,59%; + 65 ans : 2,91%

Espérance de vie des hommes : 46 ans (en 2001)

Espérance de vie des femmes : 47 ans (en 2001)

 

 

 

Pannonhalma, monastère du 21eme siècle

medium_pannon2.jpgLors de notre passage à l’abbaye de Pannonhalma, nous avons eu le plaisir d’être reçu par l’Archévêque Asztrik Várszegi, en personne, qui nous a permis de découvrir son monastère dans les meilleures conditions.
Il nous a confié au Père Titus, Directeur des études, pour une visite passionnante effectuée avec brio dans un français parfait.

L’abbaye de Pannonhalma est classée au patrimoine mondial de l’humanité, car pour l’Unesco elle illustre « de manière exceptionnelle la structure et l’organisation d’un monastère chrétien en constante évolution depuis mille ans » (sic).

Le monastère abrite également dans ses murs une école et un lycée de garçons de 350 élèves(internat), les logements des moines, un foyer de personnes âgées, une bibliothèque et une école supérieure de théologie (séminaire).

Depuis 996, Pannonhalma tient une place particulière dans l’histoire de la Hongrie; de nombreux visiteurs prestigieux s’y sont rendus, du Premier roi de Hongrie, Etienne Ier, à Jean Paul II ou au Dalaî Lama plus récemment qui y a effectué une retraire spirirtuelle.

Elle joue aujourd’hui, un rôle moteur dans le développement de la région de Pannon, tant culturel qu’économique.

Mais comment cela peut il être compatible avec les règles édictés par Saint Benoît ?

 

medium_pannon4.jpgUn monastère vieux de de mille ans et plus …

En 996, des moines bénédictins s’implantent sur la colline de Pannonhalma, lieu de naissance de Saint Martin (l’évêque de Tours) et fondent un monastère qu’ils lui dédient.
Vivant selon les règles édictées par Saint Benoît, ils évangélisent les hongrois, créent la première école magyare et rédigent en 1055, le premier texte écrit en hongrois.
Cette communauté monastique prend une place considérable dans la diffusion de la culture chrétienne en Europe centrale. Véritable forteresse, elle connait une histoire mouvementée avec trois occupations turques qui amènent les moines à fuir pour sauver les biens et manuscrits de l’abbaye, haut lieu de la connaissance de l’époque.
En 1786, Joseph II d’Autriche ferme les monastères mais rétablit en 1802 celui de Pannonhalma, sous condition que les moines bénédictins enseignent. Depuis lors, l’abbaye est devenu un important Centre Universitaire, et a collecté pour sa magnifique bibliothèque de style néoclassique un fonds documentaire de plus de 350 000 volumes.
Protégée par la Croix-Rouge durant la deuxième guerre mondiale, elle ne subit ni dommage ni pillage et lors du régime communiste (1950-1990), elle conserve ses biens et ses missions d’enseignement privé malgré certaines contraintes. En décembre 1996, à l’occasion de son millénaire, elle est inscrite au Patrimoine mondial de l’Unesco lors d’une grande commémoration officielle en présence du pape Jean Paul II.

 

L’activité monastique
Les cérémonies religieuses s’y déroulent au rythme des chants grégoriens et de l’orgue, selon un cérémonial qui semble  immuable depuis des siècles comme si le temps s’était arrêté aux portes du monastère.
Les moines suivent les règles de vie écrites édictées par Saint Benoît en 528 et résumées dans la devise de l’ordre bénédictin : Pax (Paix). Leur vie est divisée en de régulières périodes de sommeil, prière, lectures sacrées, repos et travail physique. Le travail intellectuel et l’enseignement ont remplacé peu à peu l’agriculture fermière et les autres formes de travail manuel. La règle bénédictine qui considère le travail manuel comme une action noble eut une grande influence sur la civilisation de l’Europe au Moyen-Âge, en imposant notamment aux religieux un travail extérieur, manuel ou littéraire.

 

Le « levain de l’évangile »
Depuis la chute du mur de Berlin, l’abbaye de Pannonhalma est une destination touristique recherchée des visiteurs séjournant en Hongrie (plus de 200 000 par an). Ils peuvent y acquérir de multiples produits dérivés comme souvenirs : reproductions, carterie, produits du terroir (herbes et plantes médicinales cultivées par l’abbaye), livres, Cd de musique (chants sacrés et orgue); nous ne sommes pas à Lourdes pour autant, les produits provenant principalement de l’activité des moines.
Pour l’abbaye les sources de financement sont multiples, puisqu’il faut y ajouter l’argent des visites, les dons, les activités d’enseignement … Des revenus qui permettent de faire vivre les 45 moines et les personnes qui travaillent pour l’abbaye (cuisine, entretien, enseignement, maintenance et sécurité du site).

A cette activité somme toute classique, s’ajoute désormais l’industrie vinicole et oenologique. Les moines ont renoué d’une certaine manière avec le travail de la terre; l’abbaye en 1900 possédait plus de 100 hectares de vignobles dans les environs immédiats de Pannonhalma (comme sur d’autres vignobles, dont Tokaj), aprés la deuxième guerre mondiale, les caves et les domaines deviennent propriétés gouvernementales.
En 2000, les moines de l’abbaye, associés à une importante banque hongroise décident de relancer l’activité vinicole sur 52 hectares afin de produire un vin blanc de qualité, selon les méthodes de production les plus modernes, projet financé sur fonds européens. Leur business plan planifié sur plusieurs années a pour objectif d’implanter dans la région une activité vinicole moderne, de qualité, diversifié (Chardonnay, Pinot Noir, Merlot, cabernet Franc) bénéficiant de la renommée mondiale de l’abbaye.

Lors des rencontres des épiscopats d’Europe centrale, en mai 2004, le CARDINAL ANGELO SODANO ne disait il pas : « C’est un travail lent et patient, tout comme est lent et patient le travail de l’Eglise en général, pour placer le levain de l’Evangile dans la nouvelle réalité du continent, comme elle l’a toujours fait au cours des deux mille ans de son histoire … »
Justifiant ainsi à sa manière, l’activité déployée par les moines sur le terrain économique (le levain de l’Evangile) accompagnant le développement de la renommée du  monastère bénédictin en appliquant les règles du marché et de la libre entreprise dans un ancien pays communiste.

Assiterait on à une évangélisation déguisée par l’économie ?

Signalons toutefois, que lors du même discours, ce Cardinal abordait un terrain nettement plus polémique et politique :   » Aujourd’hui, il y a le défi du laïcisme, qui tente d’occulter la présence des valeurs religieuses, et en particulier des valeurs chrétiennes, dans la vie publique. On le voit également dans le débat en cours sur le Traité constitutionnel de l’Union européenne. ».
Une position trés populaire dans certains pays d’Europe Centrale (Hongrie, Roumanie, pologne …) ainsi que dans les rangs de partis politiques comme la Démocratie Chrétienne, le CDU en Allemagne mais qui résonnent bizarrement dans les oreilles d’un français épris des vertus de la République et convaincu de ses valeurs laïques.

Propos qui démontrent une fois de plus que le Traité Constitutionnel Européen tant décrié chez nous par certains, représentait dans beaucoup de domaines une sacrée avancée.

Comme quoi … au fait où en et le plan B ?