70 ans ont passé …

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Certaines cérémonies nous éloignent heureusement d’une actualité ou le manque de valeurs républicaines, y compris de nos dirigeants, devient préoccupant, c’est notamment le cas de ce 14 juillet 2010, qui intervient  70 ans après 1940, l’année où tout a basculé, avec l’appel du 18 juin ….

Epoque épique que celle de la 2ème guerre mondiale.
Nous sommes toujours redevables aujourd’hui aux anciens qui ont permis à la France de sortir, non seulement la tête haute d’un conflit mondial généralisé, mais qui l’ont libéré du joug d’une dictature sanguinaire.

Souvenons nous de l’importance de cet appel, lueur insensée, fragile et magique, véritable fanal d’un phare s’adressant à un pays perdu dans la tempête et qui l’a mené peu à peu à bon port.

Saluons la décision  historique de Charles de Gaulle, alors sous-secrétaire d’État à la Défense, qui de retour d’une visite d’Etat à Londres auprès de Winston Churchill le 16 juin 1940, apprend le même jour la nomination du maréchal Pétain, partisan de l’armistice, comme nouveau chef du gouvernement et à l’écoute de l’annonce à la radio, le lendemain, par ce dernier de  l’arrêt des combats décide de  repartir immédiatement pour Londres.

Il y rencontre aussitôt Churchill et lui fait part de son intention d’appeler à la résistance ses compatriotes. Ce dernier, contre l’avis de nombreux ministres britanniques pensant la victoire des nazis inéluctable, l’aide dans cette folle entreprise.
Trop de citoyens ignorent ce que notre pays doit à Winston Churchill. Sans lui, il n’y aurait pas eu d’appel du 18 juin.
Les journées qui ont suivi ont été déterminantes, peu de nos compatriotes ayant entendu le Général alors. C’est jour après jour, pierre par pierre, de bouche à oreille, que ce Général de Brigade à titre temporaire de 49 ans, va bâtir non seulement un destin unique, mais ouvrir de nouvelles perspectives à notre pays grâce à la puissance et au pouvoir des mots légitimes qu’il a prononcé.


« La première chose à faire était de hisser les couleurs, a t’il écrit bien des années après, la radio s’offrait pour cela.

A mesure que s’envolaient les mots irrévocables, je sentais en moi-même se terminer une vie, celle que j’avais mené dans le cadre d’une France solide et d’une indivisible armée. A quarante-neuf ans, j’entrais dans l’aventure, comme un homme que le destin jetait hors de toutes les séries. »

 

C’est avec reconnaissance et émotion que nous nous sommes associés à cette commémoration lors de la fête nationale, dédiée à la République et à ses valeurs, anti thèse de celles défendues par les nazis et les fascistes…
Il est heureux qu’en 1940, les français de souche, de nationalité ou de cœur, de toutes origines, couleurs, cultures, religions, se soient mobilisés contre vent et marées, au péril de leur vie, pour libérer notre pays et nos consciences … Nous n’oublierons jamais notre dette a leur égard !

Un de ces français a illuminé de ses mots simples cette période noire de notre histoire. Son recueil « Poésie et Vérité » parut en 1942 rassemblant des poèmes de lutte a été diffusé à travers toute l’Europe sous le manteau, par radio, ou parachutage, dont le plus fameux, Liberté


Chacun comprendra mon émotion lorsque j’ai honoré au nom de l’Etat français, quatre de nos anciens, qui ont traversé cette période trouble, tumultueuse et dramatique de notre histoire. Il est essentiel, aujourd’hui plus qu’hier, de rappeler leur dévouement et le sacrifice de ceux qui y ont laissé malheureusement leur vie.


Tous, ils ont rendu ses couleurs à notre pays et à notre République : le Bleu, le Blanc, le Rouge et redonné sens aux trois valeurs républicaines : Liberté, Egalité, Fraternité …


 

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Liberté

 

Sur mes cahiers d’écolier

Sur mon pupitre et les arbres

Sur le sable sur la neige

J’écris ton nom

 

Sur toutes les pages lues

Sur toutes les pages blanches

Pierre sang papier ou cendre

J’écris ton nom

 

Sur les images dorées

Sur les armes des guerriers

Sur la couronne des rois

J’écris ton nom

 

Sur la jungle et le désert

Sur les nids sur les genêts

Sur l’écho de mon enfance

J’écris ton nom

 

Sur les merveilles des nuits

Sur le pain blanc des journées

Sur les saisons fiancées

J’écris ton nom


Sur tous mes chiffons d’azur

Sur l’étang soleil moisi

Sur le lac lune vivante

J’écris ton nom


Sur les champs sur l’horizon

Sur les ailes des oiseaux

Et sur le moulin des ombres

J’écris ton nom

 

Sur chaque bouffée d’aurore

Sur la mer sur les bateaux

Sur la montagne démente

J’écris ton nom

 

Sur la mousse des nuages

Sur les sueurs de l’orage

Sur la pluie épaisse et fade

J’écris ton nom

 

Sur les formes scintillantes

Sur les cloches des c ouleurs

Sur la vérité physique

J’écris ton nom

 

Sur les sentiers éveillés

Sur les routes déployées

Sur les places qui débordent

J’écris ton nom

 

Sur la lampe qui s’allume

Sur la lampe qui s’éteint

Sur mes maisons réunis

J’écris ton nom

 

Sur le fruit coupé en deux

Dur miroir et de ma chambre

Sur mon lit coquille vide

J’écris ton nom

 

Sur mon chien gourmand et tendre

Sur ses oreilles dressées

Sur sa patte maladroite

J’écris ton nom

 

Sur le tremplin de ma porte

Sur les objets familiers

Sur le flot du feu béni

J’écris ton nom

 

Sur toute chair accordée

Sur le front de mes amis

Sur chaque main qui se tend

J’écris ton nom

 

Sur la vitre des surprises

Sur les lèvres attentives

Bien au-dessus du silence

J’écris ton nom

 

Sur mes refuges détruits

Sur mes phares écroulés

Sur les murs de mon ennui

J’écris ton nom

 

Sur l’absence sans désir

Sur la solitude nue

Sur les marches de la mort

J’écris ton nom

 

Sur la santé revenue

Sur le risque disparu

Sur l’espoir sans souvenir

J’écris ton nom

 

Et par le pouvoir d’un mot

Je recommence ma vie

Je suis né pour te connaître

Pour te nommer

Liberté.

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Paul Eluard

1942, « Poésies et vérité »