Bon vent au fils de Aracataca

 

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« J’ai tant appris de vous,

les hommes,

J’ai appris que tout le monde
 veut vivre au sommet de la montagne, 
sans soupçonner que le vrai bonheur 
est dans la manière de gravir la pente. »

Gabriel Garcia Marquez

 

 

Son discours de réception du Prix Nobel,  toute la tragique histoire moderne du continent Sud américain …
« y donde las estirpes condenadas a cien años de soledad tengan por fin y para siempre una segunda oportunidad sobre la tierra … »

 

 

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DISCOURS DE RECEPTION DU PRIX NOBEL
8 décembre 1982

 

La soledad de America latina
Un día como el de hoy, mi maestro William Faulkner dijo en este lugar: « Me niego a admitir el fin del hombre ».

 

9 août 2010. Antonio Pigafetta, un navigateur florentin qui a accompagné Magellan lors du premier voyage autour du monde, a écrit lors de son passage par notre Amérique méridionale une chronique rigoureuse qui paraît cependant une aventure de l’imagination.
Il a raconté qu’il avait vu des cochons avec le nombril dans le dos, et quelques oiseaux sans pattes dont les femelles couvaient dans les dos du mâle, et d’autres comme des pélicans sans langue dont les becs ressemblaient à une cuiller. Il a raconté qu’il avait vu une créature animale avec une tête et des oreilles de mule, un corps de chameau, des pattes de cerf et un hennissement de cheval. Il a raconté que le premier natif qu’ils ont trouvé en Patagonie ils l’ont mis en face d’un miroir, et que ce géant exalté a perdu l’usage de la raison par la frayeur de sa propre image.

Ce livre bref et fascinant, dans lequel se perçoivent déjà les germes de nos romans d’aujourd’hui, n’est pas beaucoup moins le témoignage le plus étonnant de notre réalité de ces temps. Les Chroniqueurs de l’Amérique nous ont légué d’autres irracontables. Eldorado, notre pays illusoire si convoité, a figuré dans de nombreuses cartes pendant de longues années, en changeant de lieu et de forme selon l’imagination des cartographes. A la recherche de la fontaine de la Jeunesse Éternelle, la mythique Alvar Núñez Cabeza de Vaca a exploré huit ans durant le nord du Mexique, dans une expédition folle dont les membres se sont mangés entre eux, et seuls cinq des 600 qui l’ont entreprise sont arrivés. L’un des nombreux mystères qui n’ont jamais été élucidés, est celui des onze mille mules chargées de cent livres d’or chacune, qui un jour sont sortis du Cuzco pour payer le sauvetage d’Atahualpa et qui ne sont jamais arrivées à destination. Plus tard, pendant la colonie, se vendaient à Carthagène, quelques poules élevées dans des terres d’alluvion, dans les gésiers desquelles se trouvaient des petits cailloux d’or. Ce délire doré de nos fondateurs nous a poursuivis jusqu’il y a peu. À peine au siècle passé la mission allemande chargée d’étudier la construction d’un chemin de fer interocéanique dans l’isthme du Panama, a conclu que le projet était viable à condition que les rails ne fussent pas faits en fer, qui était un métal peu abondant dans la région, mais qu’ils soient faits en or.

L’indépendance de la domination espagnole ne nous a pas mis à l’abri de la démence. Le général Antonio López de Santana, qui a été trois fois dictateur du Mexique, a fait enterrer avec des funérailles magnifiques sa jambe droite qu’il avait perdue dans la dite Guerra de los Pasteles. Le général Gabriel García Morena a gouverné l’Équateur pendant 16 ans comme un monarque absolu, et son cadavre a été veillé vêtu de son uniforme de gala et sa cuirasse de décorations assis dans le fauteuil présidentiel. Le général Maximiliano Hernández Martínez, le despote théosophe du Salvador qui a fait exterminer dans un massacre barbare 30 mille paysans, avait inventé un pendule pour vérifier si les aliments étaient empoisonnés, et a fait couvrir d’un papier rouge l’éclairage public pour combattre une épidémie de scarlatine. Le monument au général Francisco Morazán, érigé sur la place la plus grande de Tegucigalpa, est en réalité une statue du maréchal Ney achetée à Paris dans un dépôt de sculptures usées.

Il y a onze ans, l’un des poètes insignes de notre temps, le Chilien Pablo Neruda, a illuminé cette enceinte avec son verbe. Dans les bonnes consciences de l’Europe, et parfois aussi dans les mauvaises, ont fait irruption depuis ce temps-là avec plus de force que jamais les nouvelles fantomatiques de l’Amérique Latine, cette patrie immense d’hommes hallucinés et de femmes historiques, dont l’entêtement sans fin se confond avec la légende. Nous n’avons pas eu un instant de calme. Un président prometheique retranché dans son palais en flammes est mort en se battant seul contre toute une armée, et deux catastrophes aériennes suspectes et jamais éclaircies ont tranché la vie d’un autre au cœur généreux, et celle d’un militaire démocrate qui avait restauré la dignité de son peuple. Il y a eu 5 guerres et 17 coups d’État, et a surgi un dictateur luciférien qui au nom de Dieu mène le premier ethnocide de l’Amérique Latine de notre temps. Pendant ce temps, 20 millions d’enfants latinoaméricains mouraient avant d’atteindre l’âge de deux ans, ce qui est plus que tous ceux qu’ils sont nés en Europe depuis 1970. En raison de la répression il y a presque 120 000 disparus, c’est comme si aujourd’hui on ne savait pas où sont passés tous les habitants de la ville d’Uppsala. De nombreuses femmes enceintes ont été arrêtées ont mis au monde dans des prisons argentines, mais on ignore encore le destin et l’identité de ses enfants, qui ont été donnés en adoption clandestine ou enfermés dans des orphelinats par les autorités militaires. Pour ne pas vouloir que les choses continuent ainsi près de 200 000 femmes et hommes sont morts sur tout le continent, et plus de 100 000 ont péri dans trois petits pays volontaristes de l’Amérique centrale, Nicaragua, Salvador et Guatemala. Si c’était aux États-Unis, le chiffre proportionnel serait d’un million 600 morts violentes en quatre ans.

Du Chili, un pays aux traditions hospitalières, a fui un million de personnes : 12 % pour cent de sa population. L’Uruguay, une nation minuscule de 2,5 millions d’habitants qui se considérait comme le pays le plus civilisé du continent, a perdu dans l’exil un citoyen sur cinq. La guerre civile au Salvador a causé presque un réfugié toutes les 20 minutes depuis 1979. Le pays qu’on pourrait faire avec tous les exilés et émigrés forcés d’Amérique Latine, aurait une population plus nombreuse que la Norvège.

J’ose penser, que c’est cette réalité extraordinaire, et pas seulement son expression littéraire, qui cette année a mérité l’attention de l’Académie Suédoise des Lettres. Une réalité qui n’est pas celle du papier, mais qui vit avec nous et détermine chaque instant de nos innombrables morts quotidiennes, et qui soutient une source de création insatiable, pleine de malheur et de beauté, de laquelle ce Colombien errant et nostalgique n’est qu’un parmi d’autres plus distingué par la chance. Poètes et mendiants, musiciens et prophètes, guerriers et racaille, toutes les créatures de cette réalité effrénée nous avons eu très peu à demander à l’imagination, parce que le plus grand défi fut pour nous l’insuffisance des ressources conventionnelles pour rendre notre vie croyable. C’est cela, amis, le nœud de notre solitude.

Donc si ces difficultés nous engourdissent, que nous sommes de son essence, il n’est pas difficile de comprendre que les talents rationnels de ce côté du monde, extasiés dans la contemplation de leurs propres cultures, sont restés sans méthode valable pour nous interpréter. Il est compréhensible qu’ils insistent pour nous mesurer avec le même étalon avec lequel ils se mesurent eux même, sans rappeler que les épreuves de la vie ne sont pas égaux pour tous, et que la recherche de l’identité propre est si ardue et sanglante pour nous qu’elle le fut pour eux. L’interprétation de notre réalité avec des schémas étrangers contribue seulement à nous rendre de plus en plus méconnus, de moins en moins libres, de plus en plus solitaires. Peut-être l’Europe vénérable serait plus compréhensive si elle essayait de nous voir à travers son propre passé. Si elle se rappelait que Londres a eu besoin 300 ans pour construire sa première muraille et de 300 autres pour avoir un évêque, que Rome s’est débattu dans les ténèbres de l’incertitude pendant 20 siècles avant qu’un roi étrusque ne l’implantât dans l’histoire, et qu’encore au XVIe siècle les suisses pacifiques d’aujourd’hui, qui nous enchantent avec leurs fromages doux et leurs montres impavides, ensanglantèrent l’ Europe comme soldats de fortune. Encore à l’apogée de la Renaissance, 12 000 lansquenets à la solde des armées impériales pillèrent et dévastèrent Rome, et tuèrent à coups de couteau huit mille de ses habitants.

Je ne cherche pas à incarner les illusions de Tonio Kröger, dont les rêves d’union entre un nord chaste et un sud passionné exaltaient Thomas Mann il y a 53 ans dans ce lieu. Mais je crois que les Européens d’esprit éclairant, ceux qui luttent aussi ici pour une grande patrie plus humaine et plus juste, pourraient mieux nous aider s’ils révisaient à fond leur manière de nous voir. La solidarité avec nos rêves ne nous fera pas sentir moins seuls, tant que cela ne se concrétise avec des actes de soutien légitime aux peuples qui assument l’illusion d’avoir une vie propre dans la répartition du monde.

L’Amérique Latine ne veut pas ni n’a de quoi être un fou sans arbitre, ni n’a rien de chimérique dans le fait que ses desseins d’indépendance et d’originalité deviennent une aspiration occidentale. Cependant, les progrès de la navigation qui ont réduit tant de distances entre nos Amériques et l’Europe, semblent avoir augmenté en revanche notre distance culturelle. Pourquoi l’originalité qu’on nous admet sans réserves dans la littérature nous est refusée avec toute sorte de suspicions dans nos si difficiles tentatives de changement social ? Pourquoi penser que la justice sociale que les Européens d’avant garde essaient d’imposer dans leurs pays ne peut pas aussi être un objectif latinoaméricain avec des méthodes distinctes dans des conditions différentes ? Non : la violence et la douleur démesurées de notre histoire sont le résultat d’injustices séculières et d’amertumes innombrables, et non un complot ourdi à 3 000 lieues de notre maison. Mais nombre de dirigeants et penseurs européens l’ont cru, avec l’infantilisme des grands-parents qui ont oublié les folies fructueuses de leur jeunesse, comme si n’était possible un autre destin que de vivre à la merci des deux grands propriétaires du monde. Telle est, amis, l’ampleur de notre solitude.

Cependant, face à l’oppression, au pillage et à l’abandon, notre réponse est la vie. Ni les déluges ni les pestes, ni les famines ni les cataclysmes, ni même les guerres éternelles à travers des siècles et des siècles n’ont réussi à réduire l’avantage tenace de la vie sur la mort. Un avantage qui augmente et s’accélère : chaque année il y a 74 millions de naissances de plus que de décès, une quantité de vivants nouveaux comme pour augmenter sept fois chaque année la population de New York. La majorité d’ entre eux naissent dans des pays avec moins de ressources, et parmi ceux-ci, bien sûr, ceux d’Amérique Latine. En revanche, les pays les plus prospères ont réussi à accumuler assez de pouvoir de destruction comme pour anéantir cent fois non seulement tous les êtres humains qui ont existé jusqu’à aujourd’hui, mais la totalité des êtres vivants qui sont passés par cette planète d’infortune.

Un jour comme celui d’aujourd’hui, mon maître William Faulkner a dit dans ce lieu : « Je me refuse à admettre la fin de l’homme ». Je ne me sentirais pas digne d’occuper cet endroit qui fut le sien si je n’avais pas pleine conscience de ce que pour la première fois depuis les origines de l’humanité, la catastrophe colossale qu’il se refusait à admettre il y a 32 ans est maintenant rien plus qu’une simple possibilité scientifique. Devant cette réalité saisissante qui à travers tout le temps humain a du paraître une utopie, les inventeurs de fables que tous nous croyons nous nous sentons le droit de croire que n’est pas encore trop tard pour entreprendre la création de l’utopie contraire.
Une nouvelle et triomphante utopie de la vie, où personne ne peut décider pour les autres jusqu’à la forme de mourir, où vraiment soit vrai l’amour et soit possible le bonheur, et où les lignées condamnées à cent ans de solitude ont enfin et pour toujours une deuxième chance sur la terre.

Traduction libre et non officiel de l’espagnol pour El Correo de : Estelle et Carlos Debiasi

 

En espagnol

Antonio Pigafetta, un navegante florentino que acompañó a Magallanes en el primer viaje alrededor del mundo, escribió a su paso por nuestra América meridional una crónica rigurosa que sin embargo parece una aventura de la imaginación. Contó que había visto cerdos con el ombligo en el lomo, y unos pájaros sin patas cuyas hembras empollaban en las espaldas del macho, y otros como alcatraces sin lengua cuyos picos parecían una cuchara. Contó que había visto un engendro animal con cabeza y orejas de mula, cuerpo de camello, patas de ciervo y relincho de caballo. Contó que al primer nativo que encontraron en la Patagonia le pusieron enfrente un espejo, y que aquel gigante enardecido perdió el uso de la razón por el pavor de su propia imagen.

Este libro breve y fascinante, en el cual ya se vislumbran los gérmenes de nuestras novelas de hoy, no es ni mucho menos el testimonio más asombroso de nuestra realidad de aquellos tiempos. Los Cronistas de Indias nos legaron otros incontabels. Eldorado, nuestro país ilusorio tan codiciado, figuró en mapas numerosos durante largos años, cambiando de lugar y de forma según la fantasía de los cartógrafos. En busca de la fuente de la Eterna Juventud, el mítico Alvar Núñez Cabeza de Vaca exploró durante ocho años el norte de México, en una expedición venática cuyos miembros se comieron unos a otros, y sólo llegaron cinco de los 600 que la emprendieron. Uno de los tantos misterios que nunca fueron descifrados, es el de las once mil mulas cargadas con cien libras de oro cada una, que un día salieron del Cuzco para pagar el rescate de Atahualpa y nunca llegaron a su destino. Más tarde, durante la colonia, se vendían en Cartagena de Indias unas gallinas criadas en tierras de aluvión, en cuyas mollejas se encontraban piedrecitas de oro. Este delirio áureo de nuestros fundadores nos persiguió hasta hace poco tiempo. Apenas en el siglo pasado la misión alemana encargada de estudiar la construcción de un ferrocarril interoceánico en el istmo de Panamá, concluyó que el proyecto era viable con la condición de que los rieles no se hicieran de hierro, que era un metal escaso en la región, sino que se hicieran de oro.

 

La independencia del dominio español no nos puso a salvo de la demencia. El general Antonio López de Santana, que fué tres veces dictador de México, hizo enterrar con funerales magníficos la pierna derecha que había perdido en la llamada Guerra de los Pasteles. El general Gabriel García Morena gobernó al Ecuador durante 16 años como un monarca absoluto, y su cadáver fue velado con su uniforme de gala y su coraza de condecoraciones sentado en la silla presidencial. El general Maximiliano Hernández Martínez, el déspota teósofo de El Salvador que hizo exterminar en una matanza bárbara a 30 mil campesinos, había inventado un péndulo para averiguar si los alimentos estaban envenenados, e hizo cubrir con papel rojo el alumbrado público para combatir una epidemia de escarlatina. El monumento al general Francisco Morazán, erigido en la plaza mayor de Tegucigalpa, es en realidad una estatua del mariscal Ney comprada en Paris en un depósito de esculturas usadas.

 

Hace once años, uno de los poetas insignes de nuestro tiempo, el chileno Pablo Neruda, iluminó este ámbito con su palabra. En las buenas conciencias de Europa, y a veces también en las malas, han irrumpido desde entonces con más ímpetus que nunca las noticias fantasmales de la América Latina, esa patria inmensa de hombres alucinados y mujeres históricas, cuya terquedad sin fin se confunde con la leyenda. No hemos tenido un instante de sosiego. Un presidente prometeico atrincherado en su palacio en llamas murió peleando solo contra todo un ejército, y dos desastres aéros sospechosos y nunca esclarecidos segaron la vida de otro de corazón generoso, y la de un militar demócrata que había restaurado la dignidad de su pueblo. Ha habido 5 guerras y 17 golpes de estado, y surgió un dictador luciferino que en el nombre de Dios lleva a cabo el primer etnocidio de América Latina en nuestro tiempo. Mientras tanto, 20 millones de niños latinoamericanos morían antes de cumplir dos años, que son más de cuantos han nacido en Europa desde 1970. Los desaparecidos por motivos de la represión son casi 120 mil, que es como si hoy no se supiera donde están todos los habitantes de la cuidad de Upsala. Numerosas mujeres encintas fueron arrestadas dieron a luz en cárceles argentinas, pero aun se ignora el paradero y la identidad de sus hijos, que fueron dados en adopción clandestina o internados en orfanatos por las autoridades militares. Por no querer que las cosas siguieran así han muerto cerca de 200 mil mujeres y hombres en todo el continente, y más de 100 mil perecieron en tres pequeños y voluntariosos países de la América Central, Nicaragua, El Salvador y Guatemala. Si esto fuera en los Estados Unidos, la cifra proporcional sería de un millón 600 muertes violentas en cuatro años.

 

De Chile, pais de tradiciones hospitalarias, ha huído un millón de personas: el 12 % por ciento de su población. El Uruguay, una nación minúscula de dos y medio millones de habitantes que se consideraba como el pais más civilizado del continente, ha perdido en el destierro a uno de cada cinco ciudadanos. La guerra civil en El Salvador ha causado desde 1979 casi un refugiado cada 20 minutos. El país que se pudiera hacer con todos los exiliados y emigrados forzosos de América Latina, tendría una población más numerosa que Noruega.

 

Me atrevo a pensar, que es esta realidad descomunal, y no sólo su expresión literaria, la que este año ha merecido la atención de la Academia Sueca de las Letras. Una realidad que no es la del papel, sino que vive con nosotros y determina cada instante de nuestras incontables muertes cotidianas, y que sustenta un manantial de creación insaciable, pleno de desdicha y de belleza, del cual este colombiano errante y nostálgico no es más que una cifra más señalada por la suerte. Poetas y mendigos, músicos y profetas, guerreros y malandrines, todas las criaturas de aquella realidad desaforada hemos tenido que pedirle muy poco a la imaginación, porque el desafío mayor para nosotros ha sido la insuficiencia de los recursos convencionales para hacer creíble nuestra vida. Este es, amigos, el nudo de nuestra soledad.

 

Pues si estas dificultades nos entorpecen a nosotros, que somos de su esencia, no es difícil entender que los talentos racionales de este lado del mundo, extasiados en la contemplación de sus propias culturas, se hayan quedado sin un método válido para interpretarnos. Es comprensible que insistan en medirnos con la misma vara con que se miden a sí mismos, sin recordar que los estragos de la vida no son iguales para todos, y que la búsqueda de la identidad propia es tan ardua y sangrienta para nosotros como lo fué para ellos. La interpretación de nuestra realidad con esquemas ajenos sólo contribuye a hacernos cada vez más desconocidos, cada vez menos libres, cada vez más solitarios. Tal vez la Europa venerable sería más comprensiva si tratara de vernos en su propio pasado. Si recordara que Londres necesitó 300 años para construirse su primera muralla y otros 300 para tener un obispo, que Roma se debatió en las tinieblas de la incertidumbre durante 20 siglos antes de que un rey etrusco la implantara en la historia, y que aun en el siglo XVI los pacíficos suizos de hoy, que nos deleitan con sus quesos mansos y sus relojes impávidos, ensangrentaron a Europa como soldados de fortuna. Aun en el apogeo del Renacimiento, 12 mil lansquenetes a sueldo de los ejércitos imperiales saquearon y devastaron a Roma, y pasaron a cuchillo a ocho mil de sus habitantes.

 

No pretendo encarnar las ilusiones de Tonio Kröger, cuyos sueños de unión entre un norte casto y un sur apasionado exaltaba Thomas Mann hace 53 años en este lugar. Pero creo que los europeos de espíritu clarificador, los que luchan también aquí por una patria grande más humana y más justa, podrían ayudarnos mejor si revisaran a fondo su manera de vernos. La solidaridad con nuestros sueños no nos hará sentir menos solos, mientras no se concrete con actos de respaldo legítimo a los pueblos que asuman la ilusión de tener una vida propia en el reparto del mundo.

 

América latina no quiere ni tiene por qué ser un alfil sin albedrío, ni tiene nada de quimérico que sus designios de independencia y originalidad se conviertan en una aspiración occidental. No obstante, los progresos de la navegación que han reducido tantas distancias entre nuestras Américas y Europa, parecen haber aumentado en cambio nuestra distancia cultural. ¿Por qué la originalidad que se nos admite sin reservas en la literatura se nos niega con toda clase de suspicacias en nuestras tentativas tan difíciles de cambio social? ¿Por qué pensar que la justicia social que los europeos de avanzada tratan de imponer en sus países no puede ser también un objetivo latinoamericano con métodos distintos en condiciones diferentes? No: la violencia y el dolor desmesurados de nuestra historia son el resultado de injusticias seculares y amarguras sin cuento, y no una confabulación urdida a 3 mil leguas de nuestra casa. Pero muchos dirigentes y pensadores europeos lo han creído, con el infantilismo de los abuelos que olvidaron las locuras fructíferas de su juventud, como si no fuera posible otro destino que vivir a merced de los dos grandes dueños del mundo. Este es, amigos, el tamaño de nuestra soledad.

 

Sin embargo, frente a la opresión, el saqueo y el abandono, nuestra respuesta es la vida. Ni los diluvios ni las pestes, ni las hambrunas ni los cataclismos, ni siquiera las guerras eternas a través de los siglos y los siglos han conseguido reducir la ventaja tenaz de la vida sobre la muerte. Una ventaja que aumenta y se acelera: cada año hay 74 millones más de nacimientos que de defunciones, una cantidad de vivos nuevos como para aumentar siete veces cada año la población de Nueva York. La mayoría de ellos nacen en los países con menos recursos, y entre estos, por supuesto, los de América Latina. En cambio, los paises más prósperos han logrado acumular suficiente poder de destrucción como para aniquilar cien veces no sólo a todos los seres humanos que han existido hasta hoy, sino la totalidad de los seres vivos que han pasado por este planeta de infortunios.

 

Un día como el de hoy, mi maestro William Faulkner dijo en este lugar: « Me niego a admitir el fin del hombre ». No me sentiría digno de ocupar este sitio que fue suyo si no tuviera la conciencia plena de que por primera vez desde los orígenes de la humanidad, el desastre colosal que él se negaba a admitir hace 32 años es ahora nada más que una simple posibilidad científica. Ante esta realidad sobrecogedora que a través de todo el tiempo humano debió de parecer una utopía, los inventores de fábulas que todo lo creemos nos sentimos con el derecho de creer que todavía no es demasiado tarde para emprender la creación de la utopía contraria. Una nueva y arrasadora utopía de la vida, donde nadie pueda decidir por otros hasta la forma de morir, donde de veras sea cierto el amor y sea posible la felicidad, y donde las estirpes condenadas a cien años de soledad tengan por fin y para siempre una segunda oportunidad sobre la tierra.

 

 

Gabriel García Márquez