Ecole, l’heure de la casse a t’elle sonné ?

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Retour sur une rentrée scolaire qui risque de laisser quelques traces. Les congés de la Toussaint arrivent cependant à point pour apaiser, sans doute momentanément, l’inquiétude suscitée par ces premières semaines, due principalement aux mesures prises par le Ministre Darcos.

Un mal être généralisé, s’est instauré dans nos écoles et concerne tous les acteurs de la Communauté éducative : enseignants, parents d’élèves, personnel municipal et de manière plus inquiétante bien évidemment les élèves. Gardons nous d’omettre de cette liste, nombre d’inspecteurs et d’administratifs, chargés d’appliquer des réformes sur lesquelles beaucoup en privé se montrent pour le moins « réservés » :  vague de suppression de postes sans précédent, instauration d’un soutien scolaire improvisé et déstabilisateur entrainant une gabegie incroyable dans les écoles, semaine de quatre jours, risque de démantèlement des RASED …

Entre les plateaux de télé où le Ministre  joue au réformateur zélé et la réalité du terrain, l’abîme se creuse inexorablement …  A trop confondre vitesse et précipitation, négliger la moindre concertation, privilégier la communication et la démagogie de l’instantanée et des slogans, à, la réalité concrète du terrain et du quotidien des écoles de France et de Navarre, le Ministre est en train de désorganiser en profondeur l’école primaire. Pourtant chacun sait que la croissance de demain, proviendra de notre capacité à bien former les générations futures, qui auront à se positionner demain dans un monde en mouvement ou nombre de pays émergents font de la Connaissance la rampe de lancement de leur développement.

Attention éducation en péril …. SI le démantèlement amorcé par Darcos se poursuit les conséquences risquent d’être fort graves pour notre pays …  Revue d’effectifs des sujets qui fâchent et description d’une situation qui pourrait rapidement devenir explosive …

 

D’autant que d’autres dossiers vont rapidement s’inviter sur la table (lire la suite …) …

 


Le remplacement de deux heures de classe, par deux heures de soutien (24+2 au lieu de 26) et l’instauration de la semaine de quatre jours, a non seulement changé la donne mais provoqué quelques remous, et causé  quelques incohérences, que je voudrais ici souligner :

Sur trois écoles présentes sur la commune,  chacune a choisi une modalité différente de soutien scolaire, aux services municipaux de s’adapter ! Sauf que plus personne n’y comprend rien et les  enfants se retrouvent ballotés.
Concernant le soutien effectué le midi, force est de constater, ce n’est pas une caricature, que les élèves sont plus fatigués, surtout ceux en difficulté. Chacun peut comprendre pourquoi : remplacer le moment de détente du midi, ou du soir, par une heure de soutien, n’est pas neutre. Pour les élèves d’ailleurs et leurs enseignants !
Où sont les progrès ? ce risque avait été en son temps signalé au ministre et à ses conseillers …

La fatigue et la « rancœur » de mesures prises sans concertation engendrent une réelle tension dans les écoles, où les enseignants sont de plus en plus excédés : classe plus difficile à gérer, parents d’élèves un peu déboussolés s’interrogeant et demandant des explications légitimes, collectivité ayant des difficultés à tout mettre en musique afin d’assurer à la fois le quotidien (nettoyage, maintenance, cantine) et l’exceptionnel (les murs de nos cantines ne sont pas extensibles …). Ce malaise, ou mal être, concerne également le périscolaire, d’autant que les professeurs sont de plus en plus réticents à s’impliquer dans les études surveillées, au plus grand déplaisir des parents. Cette nouvelle organisation du temps scolaire à l’école primaire va en outre à l’encontre des préconisations sur le respect des rythmes de l’enfant et sur  la prise en charge de la difficulté scolaire.

 

D’autres nuages noirs pointent à l’horizon

Après examen rapide de certaines pistes du budget 2009, toujours en discussion (le fameux 1 point de croissance !), la décision soudaine de la mise en place des heures de soutien dés cette rentrée, fait apparaitre d’autres motivations beaucoup plus comptables et mercantiles que pédagogique. A priori le Ministre envisage tout simplement de supprimer les  réseaux d’aides spécialisées aux élèves en difficultés (ou Rased), ni plus, ni moins … « remplacés » selon lui, par la mise en place de l’aide individualisée. L’annonce officielle (26 septembre) de la réaffectation dés 2009 de 3 000 maîtres spécialisés, des RASED (sur 9 000) dans des classes normales, afin de compenser les suppressions démontre l’urgence d’aborder ce sujet.  Une décision difficilement conciliable avec l’objectif ministériel de « diviser par trois » l’échec scolaire, lourd en primaire.

La situation risque à terme de se révéler catastrophique. Chaque enseignant rencontré confirme qu’autant le soutien est utile aux élèves ayant des lacunes, sous réserve de tenir compte bien évidemment de sa capacité de concentration et de sa fatigue, autant il se révèle contre productif avec ceux ayant des difficultés particulières : comportement, retards scolaires trop importants … L’intervention de maitres spécialisés, qu’ils soient maîtres E (en charge de l’aide pédagogique), ou maîtres G (rééducateurs) s’avère alors indispensable. Ils prennent le relais de l’enseignant traditionnel, utilise d’autres démarches, sont formés à ce public particulier …

En fait l’économie budgétaire à court terme, réalisé avec la suppression du dispositif des RASED, risque fort d’avoir une facture salée non seulement pour les élèves en difficulté. Les professeurs étant de plus en plus seuls face aux difficultés quotidiennes pouvant se révéler dans certains cas insurmontables.

Autre sujet abordé par X. Darcos, celui des maternelles. Son intervention au Sénat, a eu le mérite de la clarté. «  »Est-ce qu’il est vraiment logique, alors que nous sommes si soucieux de la bonne utilisation des crédits de l’État, que nous fassions passer des concours à bac+5 à des personnes dont la fonction va être essentiellement de faire faire des siestes à des enfants ou de leur changer les couches ? « . Des propos tenus au moment ou la députée UMP Tabarot remettait son rapport sur l’enseignement maternel. Si cette élue reconnait que l’accueil d’un enfant à l’école maternelle, se révèle moins couteux que tout autre mode de garde, elle souligne  notamment pour les jeunes âges l’inadéquation entre organisation scolaire traditionnelle et besoins des parents : amplitude, flexibilité … Il faut s’adapter à un monde du travail où tout bouge …  Solution abordée, le jardin d’éveil … Comme le signale avec un certain humour le Café pédagogique c’est finalement une école maternelle sans maîtres que propose M. Tabarot … Des économies à venir pour l’état, ces jardins d’éveil devant très certainement passé un jour sous le giron des collectivités territoriales !

 

Le discours gouvernemental ambiant est en décalage avec ce qui se fait actuellement dans les pays en pointe. Privilégier uniquement l’économie budgétaire à l’efficacité pédagogique, risque à moyen terme de ne plus être une économie réelle : remise en cause de la lutte contre l’exclusion et de la valorisation du capital humain dès le plus jeune âge. D’autant que ces mesures touchent en priorité les publics déjà en difficulté. C’est ce qui expliquait pourquoi dans les zones de ZEP, les priorités jusque là affichées étaient la scolarité dés 2 ans. L’école première (dénomination de l’école maternelle selon  Philippe Meirieu) permet d’apporter une rupture avec un milieu quelquefois difficile et permet une meilleure transition avec la scolarité à venir et l’appropriation d’un socle de connaissances minimum. Tous les spécialistes (pédagogues, sociologues, économistes) soulignent l’importance des 6 premières années de la vie dans le  développement d’un enfant.

Un point de vue désormais partagé partout dans le monde. Des ghettos des États-Unis aux faubourgs indiens, chacun sait que le développement futur des uns et des autres dépendra de e la qualité de la formation des pays. Avant de parler de dépense, il faut parler d’investissement public dans la connaissance. La crise que nous traversons démontre l’importance vitale pour un pays d’avoir une économie réelle solide. Dire cela est enfoncer une porte ouverte, les recherches démontrant li lien de causalité entre scolarisation maternelle et réussite des élèves à l’école élémentaire, notamment dans les quartiers défavorisés.

 

 

Enfin, abordons un nouveau venu dans le paysage institutionnel français, l’Établissement Public d’Education Primaire (EPEP), qui devrait apparaître dès 2009 et dont trop peu de personnes ont entendu parler.

Une vraie révolution ! Cette création me  rappelle une note que j’avais commis il y a quelques mois sur la RGPP, sur la base d’un article de Médiapart, où certains spécialistes en économies avaient proposé la suppression des écoles dans les petits villages. L’idée à priori de ce nouvel OVNI est de regrouper les écoles rurales au chef-lieu de canton avec un seul Directeur, sous couvert de l’inspecteur de circonscription et assisté d’un conseil d’administration, sorte de super Conseil d’école

Le projet de loi prévoit que tout école actuellement à 15 classes passerait automatiquement au statut d’EPEP (doté d’un statut juridique car Établissement public) par arrêté du Préfet, les communes pourraient décider de regrouper les petites écoles pour atteindre le seuil de 13 classes pour sa création. Aucune information, bien évidemment n’a filtré aupr »és des communes, suivant les habitudes de Monsieur Darcos. Il est vrai que cela ne sera qu’en 2009 !

 

 

Comme l’a écrit Jean Peyrelade dans un ouvrage récent « La fausse réforme ne permet pas de faire l’économie du vrai changement. » … S’il est sain et utile d’ optimiser la dépense publique, il est essentiel que le moteur de cette dynamique soit la recherche du meilleur rapport qualité prix mais en termes d’investissement. Car c’est bien de cela qu’il s’agit, d’investissement immatériel … La formation et la recherche sont les points de croissance de demain, qui nous font tellement défaut aujourd’hui. L’état c’est aussi cela !

Apparemment tous nos décideurs n’ont pas enregistré es conséquences du cataclysme que nous venons de subir et dont l’onde de choc riswque fort de se poursuivre. L’économie budgétaire à courte vue de petit épicier d’aujourd’hui peut amener le déclin de notre pays et la récession demain.

Oui à la réforme, oui à l’optimisation de la dépense publique, mais avec méthode, efficience et dialogue …

Sinon la facture sera lourde …

Victor Hugo n’écrivait il pas « ouvrir une école, c’est une prison que l’on ferme »  … aujourd’hui Monsieur Darcos et Mme Dati se donne le mot … Mais lorsque l’on voir l’état des prisons françaises, permettez moi d’avoir peur en demain !