Pourquoi lier les célébrations du 8 et du 9 mai ?

h-4-2068467-1273510558.jpgChaque année dans toutes les villes de France, le 8 mai, nous célébrons la fin de la 2eme guerre mondiale et de l’horreur nazie. Il est bon de se souvenir que le nazisme est né d’une victoire mal assumée par des vainqueurs trop dominateurs, de l’humiliation de tout un peuple et d’un pays vaincu, qu’il s’est développé au fil d’une crise économique, sociale et politique profonde et que cette idéologie a prospéré non seulement sur un nationalisme exacerbé, et le repli des peuples sur eux mêmes mais aussi sur la recherche de boucs émissaires.

Plus qu’une guerre, cette victoire a mis fin à une tragédie et une abomination …

Personne ne doit oublier les camps de concentration, le port de l’étoile jaune, la Shoah, la solution finale, tous ces morts, civils et militaires, qu’ils soient allemands, anglais, américains, russes, français, de la métropole ou des colonies d’Afrique du Nord, d’Asie, d’Afrique, tout ce sang versé et mélé …
La culture, religion, race, langue ou couleur de peau même de chacun de ces morts était sans doute différente, mais un idéal commun les animait : terrasser l’ignominie nazie afin que règne la liberté des pays, des hommes  et des consciences… 

Célébrer cette tragédie et ce sacrifice commun est un devoir de mémoire incontournable tant nous sommes redevables de ce combat pour un monde meilleur. Sans toutes ces volontés, tous ces sacrifices notre présent serait aujourd’hui sans aucun doute différent …
C’est une obligation morale que de transmettre aux générations futures, non seulement toute la symbolique d’une telle journée, mais aussi et surtout le souvenir de toutes ces horreurs vécues et subies. 
Pourtant, il me semble bon de lier la commémoration du 8 mai à celle du 9 mai, jour de l’Europe, tant nous devons paradoxalement, la lente émergence de l’Europe politique à la nécessité absolue de nos peuples de se réconcilier afin de tirer toutes les leçons d’un passé tumultueux dont celui des deux dernières guerres mondiales …

Une filiation directe, lié à tout ce sang versé durant les siècles écoulées dans tous nos pays. Filiation que François Mitterand a souligné dans un de ces tout derniers discours …

 


« II se trouve que les hasards de la vie ont voulu que je naisse pendant la Première Guerre mondiale et que je fasse la seconde.

J’ai donc vécu mon enfance dans l’ambiance de familles déchirées qui toutes pleuraient des morts et qui entretenaient une rancune et parfois une haine contre l’ennemi de la veille.

L’ennemi traditionnel !

Mais, nous en avons changé de siècle en siècle ! Les traditions ont toujours changé. J’ai déjà eu l’occasion de dire que la France avait combattu tous les pays d’Europe, à l’exception du Danemark, on se demande pourquoi !  Mais ma génération achève son cours, ce sont ses derniers actes, c’est l’un de mes derniers actes publics.

II faut donc absolument transmettre. Vous êtes vous-mêmes nombreux à garder l’enseignement de vos pères, à avoir éprouvé les blessures de vos pays, à avoir connu le chagrin, la douleur des séparations, la présence de la mort, tout simplement par l’inimitié des hommes d’Europe entre eux. II faut transmettre, non pas cette haine, mais au contraire la chance des réconciliations que nous devons, il faut le dire, à ceux qui dès 1944-1945, eux-mêmes ensanglantés, déchirés dans leur vie personnelle le plus souvent, ont eu l’audace de concevoir ce que pourrait être un avenir plus radieux qui serait fondé sur la réconciliation et sur la paix. C’est ce que nous avons fait.

Ce que je vous demande là est presque impossible, car il faut vaincre notre histoire et pourtant si on ne la vainc pas, il faut savoir qu’une règle s’imposera,  : le nationalisme, c’est la guerre ! 

La guerre ce n’est pas seulement le passé, cela peut être notre avenir,

C’est nous, qui sommes désormais les gardiens de notre paix, de notre sécurité et de cet avenir ! »

François Mitterand
Président de la République