Ligne P, une avancée majeure, enfin, mais …

Visite de Valérie Pécresse sur la ligne P, gare de Lizy sur Ourcq (photo La Marne)

Eu égard à l’état catastrophique de la ligne P, c’est peu de dire que la visite de Valérie Pécresse était attendue des élus et collectifs d’usagers. La Présidente de Région ne pouvait effectivement venir sans annonce concrète d’amélioration, vu l’accumulation de problèmes rencontrés par cette ligne sinistrée et l’absence totale de perspective pour ses usagers, nous l’attendions de pied ferme.
Si Valérie Pécresse ne peut être tenue responsable de la situation actuelle, il devient plus qu’urgent de changer de braquet (cf note du blog), de définir de nouvelles perspectives et plus que tout de changer de paradigme ; une ligne ferrée transportant plus de 110 000 usagers jour ne peut plus être traitée comme une petite ligne, tant elle a tout d’une grande comme l’a rappelé la Présidente de Région, y compris si la SNCF ne s’en était pas rendu compte jusqu’à présent.
Valérie Pécresse, accompagnée d’Alain Krakovitch Directeur Général Transilien de SNCF Mobilités Quotidiennes, a fait quelques annonces, dont une majeure. Cependant pas de langue de bois, les usagers ne verront pas leurs conditions de transport quotidiennes s’améliorer avant de nombreux mois, voir quelques années ; mais ceux de La Ferté Milon, de loin l’axe francilien le plus sinistré, disposent enfin d’une vraie perspective avec l’annonce de l’inscription de l’électrification de La Ferté Milon au prochain Contrat de Plan Etat / Région( 2020).
Celle ci constitue une vraie victoire pour les élus et collectifs d’usagers, tant elle n’était pas gagnée d’avance. Je suis satisfait d’y avoir contribué, tant c’était mon objectif. Cela fait bien une dizaine d’années, que j’essaie de convaincre les uns et les autres, du bien fondé d’une telle mesure. Beaucoup il ya seulement quelques mois, pensait une telle annonce impossible ! A priori, les arguments développés, y compris s’il ont infusé très lentement, ont peu à peu porté leurs fruits.
Electrifier Trilport / La Ferté Milon aura effectivement plusieurs conséquences positives : amélioration des conditions de transports des usagers, garantie durable d’une meilleure desserte des gares de Trilport et Meaux lors des heures de pointe, diminution du nombre de voitures stationnant à Trilport du fait des problèmes récurrents de cet axe, fluidité accrue de l’exploitation de la ligne P la gare de Meaux devenant traversante (c’est aujourd’hui un terminus), homogénéisation du matériel roulant avec pour conséquence directe l’amélioration de la maintenance …
Cette décision est également une mesure d’équité territoriale et de dignité due aux usagers. Je regrette pour ma part que nous n’ayons guère eu le soutien de la SNCF et SNCF réseau sur cette question de l’électrification.

Ne nous méprenons pas, la portée de l’annonce de Valérie Pécresse est réelle, pour en avoir discuté avec elle même et ses proches, cette décision a été pesée jusqu’au dernier moment avant d’être officiellement annoncée. Cependant les usagers devront patienter de nombreux mois avant de voir concrètement leurs conditions de transports s’améliorer.

Que penser des différentes annonces de vendredi dernier ? Quelles perspectives actuelles et futures pour les axes de La Ferté Milon et de Chateau Thierry ?
Pourquoi faut il que la mobilisation des collectifs d’usagers, certainement désabusés et décus du manque de réponse immédiate concrète, se poursuivent absolument ?

Autant de questions auxquelles je vais tenter d’apporter des réponses, partielles et subjectives très certainement, puisque ce sont les miennes …

Un impératif : rester mobilisés

Il est effectivement essentiel que collectifs d’usagers et élus ne relachent pas leur pression, tant auprès de la SNCF que d’Ile de France Mobilités afin de contribuer à ce que l’électrification se fasse dans les meilleurs délais et les conditions les plus optimales pour les voyageurs, et surtout d’éviter que les prochains mois ne deviennent un véritable enfer !

C’est pourquoi, nous devrons veiller à toujours :

  • relayer la parole, l’inquiétude, la colère parfois, d’usagers qui vivent et partagent au quotidien des conditions de transport indignes, avec trop souvent la boule au ventre en se demandant si leur train arrivera à temps et les ramènera sans galère, la journée de travail finie ! Faut il préciser que nos habitants sont désormais victimes de discrimination à l’emploi du fait de leur seul lieu de résidence, tant la réputation de la ligne P n’est plus à faire !
  • demeurer une force de contradiction, de contre expertise même, vis à vis de la SNCF, de SNCF Réseau ou d’Ile de France mobilités. Ces dernières années nous ont malheureusement trop souvent prouvé que la SNCF est faillible dans ses choix stratégiques et manque d’anticipation et parfois de clairvoyance. Il y a longtemps que la parole de ses dirigeants n’est plus à mes yeux, parole d’évangile. Les faits sont têtus et l’état actuel de la ligne P la meilleure illustration de mes propos. Cependant attention, attention la SNCF ne doit pas jouer le rôle de bouc émissaire, les politiques dont je suis, assumer également leurs failles. Force est de constater que les priorités, le calendrier, les contraintes de la SNCF, de SNCF réseau, d’Ile de France Mobilités ou de l’Etat ne correspondent pas toujours aux urgences du terrain et à celle des usagers du quotidien. J’en veux pour preuve le CDG Express qui fera l’objet d’un prochain billet. Nous aurons besoin de toute l’expertise des différents collectifs lorsque dans quelques semaines, il faudra remettre à plat les nouveaux sillons. Nous devrons alors préserver l’esprit d’équipe, l’intérêt commun, l’équité entre les territoires et jouer « collectif ».
  • poursuivre ce rôle « d’aiguillon ». Les urgences et grands projets d’infrastructures liées aux mobilités qu’Ile de France doit gérer au quotidien peuvent reléguer de nouveau le sort de la ligne P au second plan. Aussi devons nous préserver notre capacité à nous mobiliser, à nous positionner dès que nécessaire en lanceur d’alerte, afin de se rappeler au bon souvenir de qui de droit et de peser pour que notamment l’Etat participe au financement de l’électrification !
  • Rien de plus logique, ses décissions ne sont pas étrangères à l’afflux de population dans nos territoires.

Axe de La Ferté Milon

Trois séquences et temporalités différentes se dessinent désormais pour cet axe : le très court terme, (d’aujourd’hui à 2021), le court terme (de 2021 à 2024), et le moyen terme avec l’électrification.

  • Le très court terme, soyons clairs : le pire est à craindre. Aucun nouveau matériel n’est annoncé, les seules perspectives évoquées par la SNCF sont celles d’une offre dégradée : la sueur et les larmes. Pas un seul scénario fiable alternatif n’est pour l’instant au rendez vous ! Illustration de plus du manque d’anticipation du transporteur national. Si à priori « l’argent n’est pas un problème », aucune solution n’est actuellement sur la table !
  • Le court terme, 2021 à 2022 (le plus tôt sera le mieux), semble plus serein. La ligne de La Ferté Milon récupérant le parc roulant utilisé jusque là par celle de Provins. Attention cependant, c’est du vieux matériel, peu capacitaire, roulant au diésel n’aimant ni l’hiver, l’automne et l’été, mais permettant de limiter, espérons le, la galère quotidienne des usagers de cet axe.
  • Le moyen terme : l’électrification ( 2024). Quelques étapes intermédiaires son à suivre, véritables balises permettant de juger de l’avancée réelle ou non du dossier : lancement et fin des études, commandes de matériel roulant … Concernant l’hypothèse de fermeture de la ligne durant plusieurs mois évoqué par Alain Krakovitch afin d’accélérer les travaux, ce dernier a évoqué également un autre argument qu’il faut selon moi, savoir entendre : l’incapacité pour SNCF Réseau de mener ce chantier dans les prochaines années du fait d’une feuille de route trop chargée. En décodé, cela signifie que pour que l’électrification se réalise d’ici 2024, il est impératif de sous traiter les travaux, donc de fermer la ligne provisoirement durant le chantier. CQFD.

Axe de Chateau Thierry et de la Ferté sous Jouarre

Valérie Pécresse a annoncé principalement deux mesures :

  • Convention entre Île-de-France Mobilités, Région Grand Est et Hauts de France pour qu’un TER Vallée de La Marne marquent l’arrêt en gare de La Ferté-sous-Jouarre en heure de pointe le matin et le soir. Cet accord entre les trois régions constitue une première intéressante qui permettra peut être d’autres avancées futures permettant de proposer des solutions aux usagers de la ligne P ne résidant pas en Ile de France.
  • Transformation du Château-Thierry – Paris de 5h04 en train long.

Si cet axe apparait moins sinistré que celui de La Ferté Milon, tout est question de graduation, il n’est pas pour autant épargné par les aléas, pannes, problématiques de composition (train court en lieu et place de train long) qui au regard de la fréquentation croissante de la ligne sont autant de sources d’inconfort pour les usagers.

La croissance démographique et le développement des dynamiques territoriales de nos collectivités, imposent d’exploiter au mieux tout le potentiel du réseau, ce qui nécessite un parc roulant plus capacitaire, des liaisons plus fréquentes … Autant d’impératifs qui exigent de réunir quelques pré requis, tout étant lié : mise à niveau des quais afin de permettre aux gares de la ligne d’être en capacité d’accueillir les nouvelles rames, renforcement du réseau électrique pour qu’il soit en mesure de fournir l’intensité électrique nécessaire, ce qu’il ne peut toujours pas faire aujourd’hui, obtention de nouveaux sillons …
Il convient de moderniser au mieux le réseau, notamment le noeud ferroviaire que constitue la Gare de l’Est. Autant d’approches et d’avancées qui doivent être menés transversalement et non plus en silo. C’est aussi une des raisons de tous les problèmes techniques que nous rencontrons aujourd’hui !

Un audit pour la Maintenance du parc

Véritable talon d’achille, le technicentre représente un des maillons faibles du réseau, tant pour l’axe de La Ferté Milon que celui de Chateau Thierry. Une situation qu’élus et usagers dénonce depuis des annés au regard du nombre élevé de dysfonctionnements quotidiens constatés, véritable inventaire à la Prévert, dont une majorité due à des problèmes de maintenance de matériel roulant.

Devant cette situation et compte tenu de la dégradation croissante du service rendu, a Région a décidé de lancer un audit « extérieur » destiné à analyser le service de maintnance (locaux, organisation, localisation …) et à proposer des mesures correctives. L’annonce de cet audit a été salué par les collectifs d’usagers et élus, tant il apparait que la maintenance actuelle, eu égard au nombre de matériel à suivre (6), de l’état de vétusté du parc et des locaux techniques, mais également de l’organisation en place, vu la nature des pannes constatées au quotidien doit être totalement remise à plat. Si les conclusions sont attendues à l’été 2019, les mesures correctives prendront certainement du temps avant de produire des résultats concrets !

Véritable sujet également, la Gare de l’Est, véritable noeud ferroviaire qui pose inévitablement la problématique du Grand Paris Express.

Décidément, nous n’avons malheureusement pas encore fini de parler de la ligne P, nous disposons désormais cependant d’une perspective qu’il reste à concrétiser, l’électrification de la Ferté Milon.