Retour au monde réel pour une commémoration du 8 mai qui restera dans la mémoire des Trilportais présents comme un moment exceptionnel et émouvant, lors duquel un de nos concitoyen, Théodore Marin a reçu la croix de Chevalier de l’Ordre de la Légion d’honneur.
Une distinction méritée mais au combien tardive, le récipiendaire venant juste de fêter ses 95 ans.
C’est d’autant moins compréhensible lorsqu’on connait son parcours de vie. A l’âge de 18 ans il rejoint la Résistance (FFI), puis s’engage au 151e régiment d’infanterie, contribuant à la libération du pays. La seconde guerre mondiale ne se terminera pour lui que bien après, puisqu’il suit en 1946, le Maréchal Leclerc en Cochinchine et au Tonkin afin de combattre les troupes japonaises. Ce passé militaire lui a valu plusieurs décorations (dont : médaille militaire, croix de guerre 39/45, croix du combattant volontaire).
Il exercera ensuite plusieurs missions pour les PTT avant d’être embauché au CERN à Genève, ou à force de travail et de nombreux concours, il terminera Ingénieur Thermicien.
Si la légion d’honneur est destinée « à récompenser les français, civils et militaires, ayant rendu des mérites constatés à la nation … », la vie de Théodore Marin en est la parfaite l’illustration. A 18 ans il s’engage contre le nazisme afin de « Face aux ténèbres, dresser des clartés, planter des flambeaux … Des clartés qui persistent, des flambeaux qui se glissent, entre ombres et barbaries … Des clartés qui renaissent, des flambeaux qui se dressent, sans jamais dépérir … Et d’enraciner l’espérance dans le terreau du cœur, et adopter son esprit frondeur. » (Andrée Chedid).
J’ai rendu hommage à cet engagement citoyen hors du commun, en reprenant un extrait du fameux discours de Malraux lors du transfert des cendres de Jean Moulin au Panthéon. Un discours épique, d’une autre époque, qui appartient désormais à l’histoire comme la silhouette même d’André Malraux, debout, seul face à son pupitre, déclamant et scandant au rythme de sa respiration et d’un vent venu des limbes, l’hommage de la nation au chef de l’armée des ombres.
Derrière chaque mots déclamé, le souvenir de vies sacrifiées et l’évocation d’une époque insensée, d’années de douleurs, larmes, cendres, de morts et de fureur, époque oubliée aujourd’hui mais qui devrait sans doute nous amener à relativiser quelque peu les tourments de ces derniers mois dus à la crise sanitaire …
Chaque génération de la « jeunesse de France » doit se souvenir de l’abomination absolue du nazisme, de la Shoah et des camps d’extermination. Toujours et encore se souvenir, ne jamais oublier l’inoubliable, l’abject, et combattre les idées nauséabondes l’ayant provoqué.
Ne jamais oublier, afin d’être dignes de celles et ceux qui sont tombés, tués dans les combats, fusillés, gazés dans les camps, victimes de la peste brune qu’était le nazisme, ou de celles et ceux qui s’en sont sortis et qui comme Théodore Marin ont su avec courage et témérité dresser des flambeaux face aux ténèbres en faisant rimer résistance avec espérance … Il fait partie de ses éveilleurs de conscience, rares sont encore parmi nous, qui ont ouvert la voie, et permis au pays de retrouver son esprit frondeur en relevant la tête.
En l’honorant c’est la nation qui s’honore et lui rend enfin justice … A 95 ans …
C’est aussi cela l’utilité de telles cérémonies, d’autant que juste après le 8 mai, se profile le 9 mai, jour de l’Europe … Un trait d’union symbolique et bienvenu
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